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29 mars 2024 -
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L'évangile du jour
Passion de notre Seigneur Jésus Christ (Jn 18, 1 – 19, 42)

En ce temps-là, après le repas, Jésus sortit avec ses disciples et traversa le torrent du Cédron ; il y avait là un jardin, dans lequel il entra avec ses disciples. Judas, qui le livrait, connaissait l’endroit, lui aussi, car Jésus et ses disciples s’y étaient souvent réunis. Judas, avec un détachement de soldats ainsi que des gardes envoyés par les grands prêtres et les pharisiens, arrive à cet endroit. Ils avaient des lanternes, des torches et des armes.

Alors Jésus, sachant tout ce qui allait lui arriver, s’avança et leur dit :« Qui cherchez-vous? »

Ils lui répondirent : « Jésus le Nazaréen. »

Il leur dit : « C’est moi, je le suis. »

Judas, qui le livrait, se tenait avec eux. Quand Jésus leur répondit : « C’est moi, je le suis », ils reculèrent, et ils tombèrent à terre.

Il leur demanda de nouveau : « Qui cherchez-vous? »

Ils dirent : « Jésus le Nazaréen. »

Jésus répondit : « Je vous l’ai dit : c’est moi, je le suis. Si c’est bien moi que vous cherchez, ceux-là, laissez-les partir. »

Ainsi s’accomplissait la parole qu’il avait dite : « Je n’ai perdu aucun de ceux que tu m’as donnés. » Or Simon-Pierre avait une épée ; il la tira, frappa le serviteur du grand prêtre et lui coupa l’oreille droite. Le nom de ce serviteur était Malcus.

Jésus dit à Pierre « Remets ton épée au fourreau. La coupe que m’a donnée le Père, vais-je refuser de la boire ? »

Alors la troupe, le commandant et les gardes juifs se saisirent de Jésus et le ligotèrent. Ils l’emmenèrent d’abord chez Hanne, beau-père de Caïphe, qui était grand prêtre cette année-là. Caïphe était celui qui avait donné aux Juifs ce conseil : « Il vaut mieux qu’un seul homme meure pour le peuple. » Or Simon-Pierre, ainsi qu’un autre disciple, suivait Jésus. Comme ce disciple était connu du grand prêtre, il entra avec Jésus dans le palais du grand prêtre. Pierre se tenait près de la porte, dehors. Alors l’autre disciple – celui qui était connu du grand prêtre – sortit, dit un mot à la servante qui gardait la porte, et fit entrer Pierre.

Cette jeune servante dit alors à Pierre : « N’es-tu pas, toi aussi, l’un des disciples de cet homme ? »

Il répondit : « Non, je ne le suis pas ! »

Les serviteurs et les gardes se tenaient là ; comme il faisait froid, ils avaient fait un feu de braise pour se réchauffer. Pierre était avec eux, en train de se chauffer. Le grand prêtre interrogea Jésus sur ses disciples et sur son enseignement.

Jésus lui répondit : « Moi, j’ai parlé au monde ouvertement. J’ai toujours enseigné à la synagogue et dans le Temple, là où tous les Juifs se réunissent, et je n’ai jamais parlé en cachette. Pourquoi m’interroges-tu ? Ce que je leur ai dit, demande-le à ceux qui m’ont entendu. Eux savent ce que j’ai dit. »

À ces mots, un des gardes, qui était à côté de Jésus, lui donna une gifle en disant : « C’est ainsi que tu réponds au grand prêtre ! »

Jésus lui répliqua : « Si j’ai mal parlé, montre ce que j’ai dit de mal. Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? »

Hanne l’envoya, toujours ligoté, au grand prêtre Caïphe. Simon-Pierre était donc en train de se chauffer.

On lui dit : « N’es-tu pas, toi aussi, l’un de ses disciples ? »

Pierre le nia et dit : « Non, je ne le suis pas ! »

Un des serviteurs du grand prêtre, parent de celui à qui Pierre avait coupé l’oreille, insista : « Est-ce que moi, je ne t’ai pas vu dans le jardin avec lui ? »

Encore une fois, Pierre le nia. Et aussitôt un coq chanta. Alors on emmène Jésus de chez Caïphe au Prétoire. C’était le matin. Ceux qui l’avaient amené n’entrèrent pas dans le Prétoire, pour éviter une souillure et pouvoir manger l’agneau pascal.

Pilate sortit donc à leur rencontre et demanda : « Quelle accusation portez-vous contre cet homme ? »

Ils lui répondirent : « S’il n’était pas un malfaiteur, nous ne t’aurions pas livré cet homme. »

Pilate leur dit : « Prenez-le vous-mêmes et jugez-le suivant votre loi. »

Les Juifs lui dirent : « Nous n’avons pas le droit de mettre quelqu’un à mort. »

Ainsi s’accomplissait la parole que Jésus avait dite pour signifier de quel genre de mort il allait mourir.

Alors Pilate rentra dans le Prétoire ; il appela Jésus et lui dit :

« Es-tu le roi des Juifs ? »

Jésus lui demanda : « Dis-tu cela de toi-même, Ou bien d’autres te l’ont dit à mon sujet ? »

Pilate répondit : « Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et les grands prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu donc fait ? »

Jésus déclara : « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. »

Pilate lui dit : « Alors, tu es roi ? »

Jésus répondit : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. »

Pilate lui dit : « Qu’est-ce que la vérité ? »

Ayant dit cela, il sortit de nouveau à la rencontre des Juifs, et il leur déclara : « Moi, je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. Mais, chez vous, c’est la coutume que je vous relâche quelqu’un pour la Pâque : voulez-vous donc que je vous relâche le roi des Juifs ? »

Alors ils répliquèrent en criant : « Pas lui ! Mais Barabbas ! »

Or ce Barabbas était un bandit. Alors Pilate fit saisir Jésus pour qu’il soit flagellé. Les soldats tressèrent avec des épines une couronne qu’ils lui posèrent sur la tête ; puis ils le revêtirent d’un manteau pourpre.

Ils s’avançaient vers lui et ils disaient : « Salut à toi, roi des Juifs ! » Et ils le giflaient.

Pilate, de nouveau, sortit dehors et leur dit : « Voyez, je vous l’amène dehors pour que vous sachiez que je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. »

Jésus donc sortit dehors, portant la couronne d’épines et le manteau pourpre.

Et Pilate leur déclara : « Voici l’homme. »

Quand ils le virent, les grands prêtres et les gardes se mirent à crier : « Crucifie-le! Crucifie-le! »

Pilate leur dit : « Prenez-le vous-mêmes, et crucifiez-le ; moi, je ne trouve en lui aucun motif de condamnation. »

Ils lui répondirent : « Nous avons une Loi, et suivant la Loi il doit mourir, parce qu’il s’est fait Fils de Dieu. »

Quand Pilate entendit ces paroles, il redoubla de crainte. Il rentra dans le Prétoire, et dit à Jésus : « D’où es-tu? »

Jésus ne lui fit aucune réponse.

Pilate lui dit alors : « Tu refuses de me parler, à moi ? Ne sais-tu pas que j’ai pouvoir de te relâcher, et pouvoir de te crucifier ? »

Jésus répondit : « Tu n’aurais aucun pouvoir sur moi si tu ne l’avais reçu d’en haut ; c’est pourquoi celui qui m’a livré à toi porte un péché plus grand. »

Dès lors, Pilate cherchait à le relâcher ; mais des Juifs se mirent à crier : « Si tu le relâches, tu n’es pas un ami de l’empereur. Quiconque se fait roi s’oppose à l’empereur. »

En entendant ces paroles, Pilate amena Jésus au-dehors; il le fit asseoir sur une estrade au lieu dit le Dallage – en hébreu : Gabbatha. C’était le jour de la Préparation de la Pâque, vers la sixième heure, environ midi.

Pilate dit aux Juifs : « Voici votre roi. »

Alors ils crièrent : « À mort ! À mort ! Crucifie-le ! »

Pilate leur dit : « Vais-je crucifier votre roi ? »

Les grands prêtres répondirent : « Nous n’avons pas d’autre roi que l’empereur. »

Alors, il leur livra Jésus pour qu’il soit crucifié. Ils se saisirent de Jésus. Et lui-même, portant sa croix, sortit en direction du lieu dit Le Crâne (ou Calvaire), qui se dit en hébreu Golgotha. C’est là qu’ils le crucifièrent, et deux autres avec lui, un de chaque côté, et Jésus au milieu. Pilate avait rédigé un écriteau qu’il fit placer sur la croix ; il était écrit : « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs. » Beaucoup de Juifs lurent cet écriteau, parce que l’endroit où l’on avait crucifié Jésus était proche de la ville, et que c’était écrit en hébreu, en latin et en grec.

Alors les grands prêtres des Juifs dirent à Pilate : « N’écris pas : “Roi des Juifs” ; mais : “Cet homme a dit : Je suis le roi des Juifs.” »

Pilate répondit : « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit. »

Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent ses habits ; ils en firent quatre parts, une pour chaque soldat. Ils prirent aussi la tunique ; c’était une tunique sans couture, tissée tout d’une pièce de haut en bas.

Alors ils se dirent entre eux : « Ne la déchirons pas, désignons par le sort celui qui l’aura. »

Ainsi s’accomplissait la parole de l’Écriture : Ils se sont partagé mes habits ; ils ont tiré au sort mon vêtement. C’est bien ce que firent les soldats. Or, près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie Madeleine.

Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. »

Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. »

Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui.

Après cela, sachant que tout, désormais, était achevé pour que l’Écriture s’accomplisse jusqu’au bout, Jésus dit : « J’ai soif. »

Il y avait là un récipient plein d’une boisson vinaigrée. On fixa donc une éponge remplie de ce vinaigre à une branche d’hysope, et on l’approcha de sa bouche.

Quand il eut pris le vinaigre, Jésus dit : « Tout est accompli. »

Puis, inclinant la tête, il remit l’esprit.

Comme c’était le jour de la Préparation (c’est-à-dire le vendredi), il ne fallait pas laisser les corps en croix durant le sabbat, d’autant plus que ce sabbat était le grand jour de la Pâque. Aussi les Juifs demandèrent à Pilate qu’on enlève les corps après leur avoir brisé les jambes. Les soldats allèrent donc briser les jambes du premier, puis de l’autre homme crucifié avec Jésus. Quand ils arrivèrent à Jésus, voyant qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau. Celui qui a vu rend témoignage, et son témoignage est véridique ; et celui-là sait qu’il dit vrai afin que vous aussi, vous croyiez. Cela, en effet, arriva pour que s’accomplisse l’Écriture : Aucun de ses os ne sera brisé. Un autre passage de l’Écriture dit encore : Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé. Après cela, Joseph d’Arimathie, qui était disciple de Jésus, mais en secret par crainte des Juifs, demanda à Pilate de pouvoir enlever le corps de Jésus. Et Pilate le permit. Joseph vint donc enlever le corps de Jésus. Nicodème – celui qui, au début, était venu trouver Jésus pendant la nuit – vint lui aussi ; il apportait un mélange de myrrhe et d’aloès pesant environ cent livres. Ils prirent donc le corps de Jésus, qu’ils lièrent de linges, en employant les aromates selon la coutume juive d’ensevelir les morts. À l’endroit où Jésus avait été crucifié, il y avait un jardin et, dans ce jardin, un tombeau neuf dans lequel on n’avait encore déposé personne. À cause de la Préparation de la Pâque juive, et comme ce tombeau était proche, c’est là qu’ils déposèrent Jésus. 


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Dans les visions de Maria Valtorta
AgneauMystiqueGIMP
Date
4 avril 30
Lieu
Jérusalem
Livre
Tome 10 - ch 601.1
Passion et mort de Jésus

Enseignement de Jésus :

   « Maintenant, viens. Même si, ce soir, tu sembles sur le point d’expirer, viens : je veux te conduire à mes souffrances. Long sera le chemin que nous devrons parcourir ensemble, car aucune douleur ne m’a été épargnée : ni celles de la chair, ni celles de l’esprit, ni celles du cœur, ni celles de l’âme. Je les ai toutes connues, j’ai fait de chacune d’elles ma nourriture et ma boisson, jusqu’à en mourir.

   Si tu posais ta bouche contre mes lèvres, tu sentirais qu’elles gardent encore l’amertume d’une telle souffrance. Si tu pouvais voir mon humanité sous son aspect aujourd’hui étincelant, tu te rendrais compte de l’éclat avec lequel rayonnent les milliers de blessures qui couvrirent comme d’un vêtement pourpre vivant mes membres lacérés, exsangues, battus, transpercés par amour pour vous.

   Aujourd’hui, mon humanité resplendit. Mais elle a été semblable à celle d’un lépreux, tant elle était frappée et humiliée. L’Homme-Dieu, dont la beauté physique atteignait la perfection, puisqu’il était Fils de Dieu et de la Femme sans tache, apparaissait bien laid aux yeux de ceux qui le regardaient avec amour, curiosité ou mépris : il était un “ ver ”, comme dit David, l’opprobre des hommes, le rebut du peuple.

   Mon amour pour le Père et pour les créatures de mon Père m’a conduit à abandonner mon corps à ceux qui me frappaient, à offrir mon visage à ceux qui me giflaient et à ceux qui me crachaient à la figure, à ceux qui croyaient faire une bonne œuvre en s’en prenant à moi : ceux-là m’arrachaient les cheveux, me tiraient la barbe, ils me transpercèrent la tête avec les épines, en rendant jusqu’à la terre et ses fruits complices des tourments infligés à son Sauveur. Ils disloquèrent mes membres, découvrirent mes os, m’arrachèrent mes vêtements, infligeant ainsi à ma pureté la plus grande des tortures, ils me crucifièrent sur le bois et m’élevèrent comme un agneau saigné sur des crochets de boucher, en aboyant, autour de mon agonie, comme une meute de loups faméliques que l’odeur du sang rend encore plus féroces.

   Je fus trahi, vendu, renié ; accusé, condamné, mis à mort ; abandonné par Dieu lui-même, car sur moi pesaient les crimes que j’avais endossés ; rendu plus pauvre qu’un mendiant dévalisé par des brigands, car on ne me laissa pas un vêtement pour couvrir ma livide nudité de martyr. Même au-delà de la mort, l’insulte d’une blessure, puis les calomnies de mes ennemis ne me furent pas épargnées. Je fus submergé sous la fange de tous vos péchés, précipité jusqu’au fond de l’obscurité de la douleur, sans aucune lumière du Ciel pour répondre à mon regard de mourant, sans voix divine pour répondre à mon ultime invocation.

   Isaïe indique la raison d’un tel acharnement : “ Vraiment, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. ”

   Nos douleurs ! Oui, c’est pour vous que je les ai subies ! Pour soulager les vôtres, pour les adoucir, pour les supprimer, si vous m’étiez restés fidèles. Mais vous ne l’avez pas voulu. Et qu’avez-vous obtenu ? Vous m’avez considéré “ comme un lépreux, un homme frappé par Dieu ”. Oui, j’avais la lèpre de vos péchés infinis, comme un habit de pénitent, comme un cilice. Mais comment n’avez-vous pas vu rayonner l’infinie charité de Dieu sous ce vêtement endossé pour vous sur sa sainteté ?

   “ Couvert de plaies à cause de nos iniquités, brisé à cause de nos crimes ”, dit Isaïe, dont les yeux de prophètes voyaient le Fils de l’homme couvert de contusions pour soigner celles des hommes. Et s’il s’était agi seulement des plaies de ma chair !

   Mais vos coups qui m’ont le plus fortement atteint s’en prenaient à mes sentiments et à l’esprit. Vous les avez pris pour cible. Vous m’avez blessé dans mon amitié pour vous, à travers Judas ; dans la fidélité que j’attendais de vous, à travers Pierre qui renie ; dans la reconnaissance pour mes bienfaits, à travers ceux qui me hurlaient “ Meurs donc ! ” alors que je les avais guéris de tant de maladies ; dans l’amour, par la torture infligée à ma Mère ; à travers la religion, en me déclarant blasphémateur, moi qui, par zèle pour la cause de Dieu, m’étais remis entre les mains de l’homme en m’incarnant, en souffrant toute ma vie et en m’abandonnant à la férocité humaine sans prononcer le moindre mot ni élever la moindre plainte.

   J’aurais pu réduire en cendres les accusateurs, les juges et les bourreaux en un clin d’œil. Mais j’étais venu de mon plein gré accomplir le sacrifice. Donc, comme un agneau — puisque j’étais l’Agneau de Dieu et que je le suis éternellement —, je me suis laissé mener pour être dépouillé et tué. C’est ainsi que j’ai fait de ma chair votre Vie.

   Lorsque je fus élevé de terre, je me consumais déjà de souffrances sans nom, ou plutôt qui portaient tous les noms. C’est à Bethléem que j’ai commencé à mourir, à la vue de la lumière de la terre : elle était si différente pour moi, le Vivant du Ciel, que cela m’angoissait. J’ai continué à mourir dans la pauvreté, la fuite, l’exil, le travail, l’incompréhension, la fatigue, la trahison, les arrachements dans mes affections, les tortures, les mensonges, les blasphèmes… Voilà ce que l’homme m’a donné, à moi qui venait le réconcilier avec Dieu ! (…)


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On arracha Marie du tombeau de son fils

Marie dit :

[...] « Lorsque la pierre fut glissée dans sa cavité et ferma le Sépulcre, il m’a semblé qu’elle me passait sur le cœur, me le broyait et me l’arrachait de la poitrine. Je me suis agrippée à sa saillie par les ongles et la bouche pour la repousser, cette pierre qui me séparait de Jésus, qui me le faisait mourir une seconde fois, d’une mort plus profonde, d’une séparation encore plus grande dans laquelle même les membres de mon Fils n’étaient plus miens… Mais, hélas, je n’ai rien obtenu ! Ongles et dents glissèrent sans faire bouger la grosse pierre. Mes doigts et mes lèvres saignèrent, mais il resta fermé, fermé et inexorable comme la mort. Alors les larmes coulèrent sur le sang. Et ce sang, ces larmes de sa Mère furent les premiers qui baignèrent ce lieu saint où un Dieu connut la mort pour arracher l’homme à la mort.

Ils me détachèrent de là, car, s’ils m’y avaient laissée, j’y serai restée : là, au pied de cette porte de pierre, comme une mendiante qui attend une obole. J’étais en effet la plus misérable des femmes et, pour vivre, j’avais besoin de cette obole: revoir mon Fils ! J’étais encore moins qu’une mendiante. Je me serais blottie là comme une brebis qui a perdu son berger, qui est vagabonde, affamée, seule, et qui rentre à la bergerie fermée, à la bergerie qui n’a plus de maître, et se laisse mourir de faim là, contre le mur épais, car elle n’a plus personne et, dans ce monde rempli de loups, il lui semble être encore défendue si elle reste à l’endroit où se trouvait celui qui l’aimait… Est-ce que je n’étais pas, en effet, une brebis au milieu de loups féroces, et celui qui m’aimait n’était-il pas mort ?

Ils m’arrachèrent donc de là… Oh ! Que la pitié des hommes peut être cruelle, parfois ! Qu’auraient été ces jours pour moi, à attendre la résurrection de mon Jésus dans ce jardin paisible ? Beaucoup, beaucoup moins déchirants que ceux que j’ai dû vivre ailleurs.

Il n’y avait, à cet endroit, aucune trace de crime. Les plantes, bonnes et innocentes, continuaient à fleurir pour louer Dieu. Les oiseaux, bons et innocents, à faire leur nid et à chanter pour obéir au Seigneur. Eux, ils ne haïssaient pas, ils n’avaient jamais haï, maudit ou tué. Ils avaient entendu les cris de haine et les blasphèmes et, tout apeurés, s’étaient cachés au cœur [du feuillage] tandis que les plantes frissonnaient sous le vent de la colère. Ils avaient vu passer leur Seigneur ensanglanté, roué de coups, blessé, mourant, comme l’un des leurs à cause d’un épervier ou d’une bande de mauvais enfants ; ils en avaient ressenti à la fois de la pitié et de la peur à la pensée que la fin de toute créature était venue si leur Créateur avait été conduit à la mort, lui qui, dans sa bonté, avait toujours eu pour eux des paroles d’amour, des bénédictions et des miettes de pain.

Dans une telle paix, j’aurais pu sentir ma souffrance s’engourdir et j’aurais pleuré, sans tressaillir de douleur, sous les étoiles et dans le soleil doré, jusqu’au moment où l’aurore dominicale m’aurait ouvert les portes et rendu mon Fils.

Et les gardes ? Oh, je n’en avais pas peur ! Je me serais recroquevillée dans un coin comme une esclave dans l’attente de son maître et je leur aurais paru si méprisable qu’ils m’auraient oubliée. D'ailleurs, même s’ils s’étaient moqué de moi, qu’est-ce que cela m’aurait fait ? Que de railleries ne m’avaient-on pas lancées au sommet du Golgotha ? Je n’aurais pas pu en entendre de plus atroces. J’avais bu la lie des obscénités humaines et, depuis lors, aucune atroce imprécation qui me soit adressée, à moi, ne me surprend. Je les connais toutes… Je pouvais donc entendre aussi les plaisanteries de quelques gardes ensommeillés.

Mais on m’a arrachée de là… Et il m’a fallu revenir parmi les hommes. Les hommes !… Les hommes !… ces bêtes sauvages qui avaient tué mon Fils. Ce fut là le second calvaire de la Mère…

Voici la route !… Elle est encore détériorée par la foule qui l’a parcourue le matin à la suite du Condamné, et dans l’après-midi en s’enfuyant du mont. Pour rentrer à la maison, il me faut emprunter un sentier sur lequel ces gens cruels étaient passés.

Je vois les traces de leurs pas. Il y en a dans tous les sens, ainsi que des lambeaux de tissu et des objets perdus, comme toujours là où une foule se répand et où, dans la cohue, [les gens] s’oppressent les uns les autres. Chacun de ces signes, chacune de ces traces de pas me disait : “Je suis un bourreau de ton Fils.”

Voici ensuite le vrai chemin du Calvaire, là, à la passerelle après la Porte… Ici, les traces se font plus nombreuses, et ma douleur plus atroce… Je vois par terre des pierres et des gourdins… et je sais à quoi ils ont servi. Il y a certainement du sang de mon Fils dessus, car ils l’ont frappé sur ses membres déjà tellement lacérés !… Oh ! Je voudrais rechercher le sang de mon Fils sur ces matériaux non coupables, mais que l’homme a rendus coupables. Mais on ne me laisse pas faire. La nuit tombe. On est vendredi, la veille du sabbat. Il faut se dépêcher.

Avant de tourner le dos au Calvaire pour prendre la route qui entre dans la ville, je me retourne et, dans le crépuscule du soir, je vois trois ombres noires sur un ciel déjà pris par la nuit: ce sont les trois croix. L’une d’elles a porté mon Fils ! Mon Fils ! Elle a été le lit de son agonie ! Sa Mère, qui lui avait préparé un berceau si moelleux quand elle l’attendait et ne s’était pas donné un instant de paix pour que le premier sommeil de son Enfant n’ait pas à connaître la dureté piquante d’une litière de paille, a dû le voir mourir sur la dureté du bois…

Oh ! Vous, les mères, qui pleurez à la pensée de l’agonie de vos enfants morts, imaginez ma souffrance ! Pensez-y toutes, vous les femmes au cœur tendre, même si vous n'êtes pas mères ; pensez-y, vous les hommes bons et honnêtes, et vous aussi, les mauvais, si vous n’êtes pas tout à fait des bêtes sauvages ou des démons maudits, et ayez pitié de ma douleur ! » [...]

Les Cahiers de 1944, 3 juin